Quelle
claque que ce roman ! J’arrive à la fin de l’année, j’aurai lu autour de 25
livres en 12 mois et pas un seul coup de cœur. De belles lectures certes, mais
celle-ci... Et pourtant, je dois avouer mon préjugé, ma méfiance quand j’ai lu
que c’était un animateur radio qui l’avait écrit. Et pan ! Dans ma face...
Vincent apprend à te renseigner avant de juger. Merci également à mon ex-beau-frère
de la recommandation.
J’avais pu découvrir
néanmoins Jérôme Colin au travers d’un « Hep taxi » où
il avait embarqué un certain Loïc Nottet à fleur de peau, plus
sensible que de coutume, pas joyeux, mal dans sa peau. J’avais pu remarquer la
sensibilité de Jérôme, son approche humaine face au mal-être qu’il avait
ressenti chez son invité.
En effet, je comprends cette
fois, les jeunes mal dans leurs peau, pauvres ou riches il connaît bien notre
Jérôme Colin. Ce sont des Dragons, comme lui l’a été. Ne le demeurons-nous pas
tous un peu même si on en guérit souvent ? Vous allez comprendre en lisant ce
roman.
Les Dragons, c’est une référence aux vieilles cartes
du monde, les premières sur lesquelles étaient dessinés des Dragons pour
signifier qu’au-delà des terres connues, se trouvaient (peut-être) des
monstres, et donc l’inconnu.
C’est l’histoire d’un jeune
garçon en proie à une violence avec les siens, il a 15 ans, il est révolté, il
n’a de place nulle part, il fume de l’herbe c’est sa seule échappatoire... Mais
cette fois il va être placé en internement, le juge l’a décidé. Jérôme n’a d’autre
choix que d’y aller en échafaudant de s’enfuir à peine arrivé.
Il y aura cette phrase qui lui
reviendra plus tard : c’est difficile d’arriver, mais ce sera tout
aussi difficile de repartir...
Dans ce roman il y a une
quantité incroyable de références à notre propre jeunesse, les quelques
chansons qu’ont écoutés nos parents. Leurs attitudes face à nous, et nous qui
avons reproduit cela avec nos propres enfants. Car, ce roman démontre que l’on
vit et réitère tous les mêmes choses, les mêmes moments de vies. Jérôme va
découvrir au sein d’une sorte d’internat, le monde qu’il pense être le seul à
côtoyer, et pourtant... Les horribles monstres de la nuit, ceux qui viennent
vous dire que vous n’êtes personne, bon à rien, incapable, ces voix qui vous
obsèdent et vous assomment ! À 15 ans jusque parfois tard, on doit lutter
contre ces voix, ces sentiments, ce mal être...
Au sein de l’établissement où
il se sent puni et encore plus mal, il déteste ses parents, lui-même, la vie.
Et puis un jour, une fille, une marginale, ou une allumée arrive. En tous
les cas, elle est comme lui, elle est comme eux. Elle se sent en marge d’une
société qui impose, qui va trop vite, qui régit sans cesse. Elle souffre, et
eux aussi. Elle est là pour se protéger, pour rassurer sa famille, comme lui,
comme eux... Mais finalement le pire danger est-il dehors ? Jérôme va tomber
amoureux, et avec elle, il lira « Des souris et des hommes » ce
chef-d’œuvre de Steinbeck. Ce fameux John Steinbeck que
Jérôme aura pour compagnon au mur de sa chambre en internat. Un Steinbeck qui
ne le quittera jamais, lui qui pourtant ne lisait rien, ne le connaissait pas
ni lui ni aucun autre auteur. C’est au creux de ce petit livre pourtant, et
pour trouver un moyen d’approcher celle qu’il a choisi qu’il trouvera des
explications, une échappatoire, la lecture ! Elle aussi elle lit, et elle lit
la nuit... Dans les couloirs. Il fera comme elle, et ainsi va se construire
entre eux deux, le début d’une fin. Une issue malheureuse. C’est uni dans la
douleur que « Les Dragons », ces jeunes en difficultés, ces
incompris feront bloc dans la souffrance.
Je n’en dis pas plus, car je ne
veux pas spoiler, tout ce que je sais c’est que ce roman m’a accompagné de
Bruxelles à Ténériffe avec quelques pauses. Car, ce genre de romans il faut les
digérer. Je me suis reconnu, mais j’ai aussi reconnu mes enfants et leurs
difficultés. La différence avec mon adolescence, vers les années 1990, c’est
qu’aujourd’hui, la pression est bien plus forte, elle a une alliée qu’est la
technologie. On sait tout de vous, et vous êtes dépendant de ces fichus
réseaux. Ils ne soufflent plus nos jeunes, c’est intense et compliqué. Les
réseaux, les médias anxiogènes, les temps compliqués au niveau de l’actualité,
l’écologie. Tout ça crée de véritables tsunamis chez nos jeunes. Alors oui, je
suis un rescapé, j’ai aussi été un « Dragon », mes fils également.
Mais un beau jour, et avec encore plus de difficultés, un autre contexte, ils
auront des enfants (peut-être) et le cycle poursuivra son chemin. La vie se répétera,
et eux auront des difficultés à aider ces « nouveaux » jeunes. Tout comme nos
parents en ont eu avec nous, nous avec nos enfants...
Je ne peux citer des passages
de ce roman, tant il y en a qui m’ont marqué, bluffé. Mais lisez ce roman, et
vous aurez des réponses pour vos ados. Et eux pourront avoir quelques clés pour
déverrouiller leur prison. Celle que nous aujourd’hui adulte, savons qu’elle ne
se prénomme pas Guantanamo, mais « La vie ». Il n’y a rien de plus beau et
merveilleux on le sait, mais aussi, rien d’aussi cruel, si anxiogène... Il faut
la dompter, il faut s’accepter et apprendre à S’aimer. Le temps fera en sorte
que... lire peut aider, moi ça m’a sauvé.