mardi 9 novembre 2021

À propos de Pre de Daniel Charneux par Vincent Vallée

 



C’est lors d’une présentation littéraire que Daniel Charneux a exposé le roman que je viens de terminer. Il l’a présenté comme étant un de ceux pour lequel il a pris le plus de plaisir lors de sa rédaction. Et pour cause, il s’agit de la seconde passion de l’auteur : le jogging.

Je sais que tout auteur, pour écrire quelque chose de profond et sincère et afin de cueillir ses lecteurs, a besoin de puiser au fond de lui du vécu et c’est le cas ici. Et une présentation littéraire vous revient en mémoire lorsque vous lisez le roman en question. Des anecdotes, quelques passages ont soulevé chez moi, la mine de mon crayon. Je vais vous les partager.

Il s’agit donc de narrer sous forme d’un journal intime, ce que fut Steve Prefontaine pour le narrateur, Pete Miller. J’ai cru de prime abord, lire une biographie, mais dans ce cas le roman ne serait consacré qu’à Pre, c’était son surnom. Or, ici, il est question surtout, à mon sens, de Pete Miller. En effet, il fait souvent référence à son vieil ami Prefontaine certes, mais c'est son histoire à lui qu'on découvre, celle de Miller, Prefontaine fut un exemple et pour lui et pour tant d’autres, mais moi j’ai beaucoup plus été touché par l’envie de Pete. L’envie de courir encore, ne rien lâcher malgré les années. Et le narrateur de s’interroger par exemple en écrivant ceci : « … Pareil à ces jeunes de plus en plus nombreux qui refusent de donner la vie, car ils disent que c’est aussi donner la mort, à quoi je ne peux qu’acquiescer. »

Une des particularités de ce roman est le voyage au travers de quelques décennies américaines, ce qui nous vaut quelques jeux de mots sympathiques comme : « Amère histoire indienne » (Amérindiennes). Nous avons aussi l’opportunité d’apprécier ou non quelques morceaux de musiques des années cinquante, toute une époque avec des sons de qualité que vous aurez le loisir de découvrir lors de la lecture. Il y a aussi quelques passages encourageants (n’est-ce pas un moteur pour le joggeur les encouragements ?) comme celui-ci : « Un jour tu vas trouver quelque chose pour quoi tu es doué et ce sera ton cadeau ».

On est aussi peu surpris de se rendre compte que Pete est un auteur et d’ainsi nous donner par le biais de l’auteur (Miller/Charneux) un conseil ou plutôt une constatation qui dit : «  Tu poses ton derrière sur une chaise, tu prends la plume, tu notes en trois mots ton idée du jour, celle qui te trotte dans la tête depuis le matin, ou la nuit, ou la veille, et tu te presses le cerveau comme un citron jusqu’à ce que les trois mots soient devenus trois lignes, ou trente, ou trois pages. C’est ça, l’inspiration. »

Pete raconte un de ses récents défis, un relais entre amis vers le pied du Mount Hood, c’est ce qui m’a le plus séduis, intéressé. Cet homme qui ne baisse pas les bras se souvenant de façon redondante ce que fut Pre, ce qui fit de lui un homme hors pair, un sportif avec des convictions, une ligne de conduite. Une inspiration pour Pete en somme, comme lorsqu’il se souvient des mots de son défunt ami : « Et comment la vois-tu la course, toi, Plouc, avait demandé Bowerman ? – Comme un œuvre d’art, coach ! Une œuvre d’art ! »

Je ne peux m’empêcher de retranscrire pour moi-même un passage qui m’a replongé dans un souvenir personnel alors que je travaillais sur les toits en plein hiver, quand Pete Miller raconte : «  Nous sillonnons le quadrillage des rues avec nos gilets jaunes, nos lampes frontales, parmi les odeurs des cuisines qui sortent par bouffées du conduit des hottes aspirantes » un souvenir mitigé pour moi, qui avait faim depuis quelques heures et qui commençais à peine à me salir les mains dans le monde du travail, j’aurais tout donné pour le confort de l’attente d’un bon repas bien au chaud, à la maison.

Pour revenir à la trame du roman qu’est le sport, la philosophie autour du jogging, chaque lecteur peut transposer l’expérience de Miller/Charneux pour lui-même, comme lors de ce passage pour moi qui me suis remis au Vélo de route, sport que je pratiquais assidûment autrefois : « On n’arrête pas de jouer parce qu’on vieillit, on vieillit parce qu’on arrête de jouer » il suffirait de remplacer le verbe « jouer » par le verbe « courir ». (rouler pour moi). Mais aussi la sagesse de l’auteur (je laisse chacun juger s’il s’agit de Miller ou de Charneux) lorsqu’il écrit : « Prendre le temps me répétais-je. Profiter de chaque foulée ».

Il y a d’autres similitudes avec Daniel Charneux pour celles et ceux qui le connaissent un peu lorsqu’on lit ce passage : « Je me suis dit que mon État était beau, et que je reviendrais un jour ici, que cette fois, je quitterais la Highway, que je me lancerais dans la forêt, que j’irais tremper mes mains dans la rivière où je ramasserais des cailloux plats que j’enverrais ricocher sur l’eau vive pour les voir y plonger, s’y perdre. » Le tout au conditionnel, symbole de l'espoir et de l'envie de Pete Miller.

Ce récit au travers de ce que fut la trop courte vie de Pre est un exemple de camaraderie, de fraternité aussi, entre Pete et ses compagnons de sport. On le constate en lisant cette phrase : « Chacun y est allé de ses souvenirs. L’être humain est aussi une machine à nostalgie.

Voilà donc le récit de ce que fut pour moi cette lecture avec pour préambule, une présentation littéraire simple et décontractée. Comme je les aime. Si j’avais un seul bémol à émettre, c’est de ne pas en savoir beaucoup plus sur Prefontaine surnommé Pre. Plus d’anecdotes le concernant lui avec Miller par exemple. Mais ce roman est une réussite lorsqu’on comprend qu’il s’agit là de se souvenir de l’athlète que fut Pre, sa philosophie mise en parallèle avec son ami d’autrefois, devenu âgé, mais pas résigné. Se nourrissant ainsi de la philosophie de son sport plus que de médailles et autres lauriers. Ce qui manqua à Pre, mais après tout je n’en tire qu’une conclusion :

 

Ce qui importe ce n’est pas l’issue de la route, mais ce que fut la route et ce qu’elle nous a apporté.

vendredi 5 novembre 2021

Pourquoi écrire ? Par Vincent Vallée

 


Pourquoi écrire ?

Souvent on me pose cette question… Et j’avoue qu’au tout début je me le suis demandé, longtemps même avant de me lancer dans la publication.

Ecrire… C’est avant tout ce qui m’a toujours motivé, habité. Malgré les lacunes du début et encore celles d’aujourd’hui, que j’avoue sans rougir. Écrire est le résultat d’observations, de ressentis, de sentiments multiples. Depuis l’enfance j’en ai besoin. Louis Ferdinand Céline disait : “Quand on a pas d'imagination, mourir c'est peu de choses, quand on en a, mourir c'est trop.”

J’ai lu énormément de choses à propos des prix littéraires et j’avoue, que souvent j’ai été d’accord. Souvent, j’ai trouvé qu’il y avait là un « entre soi » malsain. La consanguinité littéraire m’exaspère au plus haut point. J’ai vu, constaté, que parfois dans les milieux modestes et humbles, tout se joue entre quelques-uns(es), au détriment de quelques talents gavés d’envie et d’ambitions qui produisent quelques pépites littéraires. Et je ne me compte pas dedans soyez rassurés, je laisse d'autres en juger. Un jour peut-être...

Mais j’ai aussi à contrario, constaté des scribouillards, ils molestent l’orthographe, la grammaire et ainsi, crachent dans la soupe. Je ne sais pas vraiment ce qu’ils recherchent, ce qu’ils tendent à obtenir si ce n’est le sentiment illusoire d’être un écrivain. Un piètre soufflet qui retombe souvent aussi rapidement. Bon Dieu, pourquoi écrire si tu n'as rien à dire, rien à sortir de tes tripes?

Je crois au fond de moi même, qu’un écrivain est une personne qui est à la hauteur d’une œuvre maintenue, continue, qui dure dans le temps. Attention, je ne dis pas une œuvre récompensée ou populaire. Je suis persuadé que si quelqu’un ne peut s’empêcher d’écrire, que c’est vital pour cette personne, et que cet auteur se donne les moyens pour travailler ses écrits, les améliorer, comprendre les règles de conjugaison, grammaire, typographie. Alors c’est un écrivain. Je préfère de loin une œuvre constante et sincère qu’une œuvre populaire et commerciale.

L’auteur qui jalouse les lauréats de divers prix littéraires avec pour arguments que c’est parce que ces auteurs sont populaires et que cela va leur faire gagner encore plus d’argent, n’ont rien compris à l’acte d’écrire. Écrire est un besoin, rien d’autre. Un écrivain écrit parce que c’est ainsi qu’il s’exprime le mieux, qu’il exprime le mieux son chagrin, sa colère ou son amour de l’autre. Là encore je vais citer Céline qui écrivait : “L'amour c'est l'infini mis à la portée des caniches.”

Je n’oublie pas un détail qui pour moi n’en est pas un : Lire. Un auteur ou un écrivain qui ne lit pas est un imposteur. Comment ne pas avoir envie de se nourrir de ce qui nous passionne et le partager. Ou encore nous motive depuis toujours ? Lire est essentiel, primordial même. J’ai parfois lu que lorsqu’un auteur écrit, il ne sait pas lire. Il fait soit l'un soit l'autre. Foutaise ! C’est essentiel de lire. C’est comme prétendre rouler en voiture sans carburant. 

Je terminerai mon propos en écrivant qu’avoir cette envie d’écrire, d’être auteur par la force des choses ne veut pas dire que vous devez être un romancier ou un nouvelliste. J’ai lu une foule de textes courts magnifiques, de courts textes à propos, riches. Après tout, pour ces gens-là, écrire c’est vivre tout simplement.