mardi 7 novembre 2023

Les Dragons, de Jérôme Colin par Vincent Vallée


Quelle claque que ce roman ! J’arrive à la fin de l’année, j’aurai lu autour de 25 livres en 12 mois et pas un seul coup de cœur. De belles lectures certes, mais celle-ci... Et pourtant, je dois avouer mon préjugé, ma méfiance quand j’ai lu que c’était un animateur radio qui l’avait écrit. Et pan ! Dans ma face... Vincent apprend à te renseigner avant de juger. Merci également à mon ex-beau-frère de la recommandation.

J’avais pu découvrir néanmoins Jérôme Colin au travers d’un « Hep taxi » où il avait embarqué un certain Loïc Nottet à fleur de peau, plus sensible que de coutume, pas joyeux, mal dans sa peau. J’avais pu remarquer la sensibilité de Jérôme, son approche humaine face au mal-être qu’il avait ressenti chez son invité.

En effet, je comprends cette fois, les jeunes mal dans leurs peau, pauvres ou riches il connaît bien notre Jérôme Colin. Ce sont des Dragons, comme lui l’a été. Ne le demeurons-nous pas tous un peu même si on en guérit souvent ? Vous allez comprendre en lisant ce roman.

Les Dragons, c’est une référence aux vieilles cartes du monde, les premières sur lesquelles étaient dessinés des Dragons pour signifier qu’au-delà des terres connues, se trouvaient (peut-être) des monstres, et donc l’inconnu.

C’est l’histoire d’un jeune garçon en proie à une violence avec les siens, il a 15 ans, il est révolté, il n’a de place nulle part, il fume de l’herbe c’est sa seule échappatoire... Mais cette fois il va être placé en internement, le juge l’a décidé. Jérôme n’a d’autre choix que d’y aller en échafaudant de s’enfuir à peine arrivé.

Il y aura cette phrase qui lui reviendra plus tard : c’est difficile d’arriver, mais ce sera tout aussi difficile de repartir...

Dans ce roman il y a une quantité incroyable de références à notre propre jeunesse, les quelques chansons qu’ont écoutés nos parents. Leurs attitudes face à nous, et nous qui avons reproduit cela avec nos propres enfants. Car, ce roman démontre que l’on vit et réitère tous les mêmes choses, les mêmes moments de vies. Jérôme va découvrir au sein d’une sorte d’internat, le monde qu’il pense être le seul à côtoyer, et pourtant... Les horribles monstres de la nuit, ceux qui viennent vous dire que vous n’êtes personne, bon à rien, incapable, ces voix qui vous obsèdent et vous assomment ! À 15 ans jusque parfois tard, on doit lutter contre ces voix, ces sentiments, ce mal être... 

Au sein de l’établissement où il se sent puni et encore plus mal, il déteste ses parents, lui-même, la vie. Et puis un jour, une fille, une marginale, ou une allumée arrive.  En tous les cas, elle est comme lui, elle est comme eux. Elle se sent en marge d’une société qui impose, qui va trop vite, qui régit sans cesse. Elle souffre, et eux aussi. Elle est là pour se protéger, pour rassurer sa famille, comme lui, comme eux... Mais finalement le pire danger est-il dehors ? Jérôme va tomber amoureux, et avec elle, il lira « Des souris et des hommes » ce chef-d’œuvre de Steinbeck. Ce fameux John Steinbeck que Jérôme aura pour compagnon au mur de sa chambre en internat. Un Steinbeck qui ne le quittera jamais, lui qui pourtant ne lisait rien, ne le connaissait pas ni lui ni aucun autre auteur. C’est au creux de ce petit livre pourtant, et pour trouver un moyen d’approcher celle qu’il a choisi qu’il trouvera des explications, une échappatoire, la lecture ! Elle aussi elle lit, et elle lit la nuit... Dans les couloirs. Il fera comme elle, et ainsi va se construire entre eux deux, le début d’une fin. Une issue malheureuse. C’est uni dans la douleur que « Les Dragons », ces jeunes en difficultés, ces incompris feront bloc dans la souffrance.

Je n’en dis pas plus, car je ne veux pas spoiler, tout ce que je sais c’est que ce roman m’a accompagné de Bruxelles à Ténériffe avec quelques pauses. Car, ce genre de romans il faut les digérer. Je me suis reconnu, mais j’ai aussi reconnu mes enfants et leurs difficultés. La différence avec mon adolescence, vers les années 1990, c’est qu’aujourd’hui, la pression est bien plus forte, elle a une alliée qu’est la technologie. On sait tout de vous, et vous êtes dépendant de ces fichus réseaux. Ils ne soufflent plus nos jeunes, c’est intense et compliqué. Les réseaux, les médias anxiogènes, les temps compliqués au niveau de l’actualité, l’écologie. Tout ça crée de véritables tsunamis chez nos jeunes. Alors oui, je suis un rescapé, j’ai aussi été un « Dragon », mes fils également. Mais un beau jour, et avec encore plus de difficultés, un autre contexte, ils auront des enfants (peut-être) et le cycle poursuivra son chemin. La vie se répétera, et eux auront des difficultés à aider ces « nouveaux » jeunes. Tout comme nos parents en ont eu avec nous, nous avec nos enfants...

 

Je ne peux citer des passages de ce roman, tant il y en a qui m’ont marqué, bluffé. Mais lisez ce roman, et vous aurez des réponses pour vos ados. Et eux pourront avoir quelques clés pour déverrouiller leur prison. Celle que nous aujourd’hui adulte, savons qu’elle ne se prénomme pas Guantanamo, mais « La vie ». Il n’y a rien de plus beau et merveilleux on le sait, mais aussi, rien d’aussi cruel, si anxiogène... Il faut la dompter, il faut s’accepter et apprendre à S’aimer. Le temps fera en sorte que... lire peut aider, moi ça m’a sauvé.

 


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