samedi 22 novembre 2025

Nicolas Sarkozy, condamné. Coupable ?

 

Nicolas Sarkozy, condamné. Coupable ?

 

Billet d’humeur du romancier Vincent Vallée

 


Une condamnation qui interroge

 

Nicolas Sarkozy a été condamné à cinq ans de prison, dont une partie ferme, pour association de malfaiteurs dans l’affaire du financement libyen.

Décidément, la Libye reste pour lui une épine dans le pied.

 

En 2011, il avait contribué à faire tomber un régime, comme les Américains l’avaient fait en Irak : au nom de la démocratie, mais au prix du chaos.

Aujourd’hui, c’est peut-être ce passé-là qui le rattrape.

 

Guerre, argent, influence, pouvoir ; autant de mots qui s’entremêlent dans ce dossier où tout semble flou, sauf les conséquences : un pays détruit, une population livrée à elle-même, des enfants qui paient encore les erreurs des adultes.

 

Et si, au fond, Sarkozy payait symboliquement le prix de cette chute, celle de Kadhafi d’abord, puis la sienne ?

Après de multiples convocations, comparutions et recours, puis la pose d’un bracelet électronique, la sentence est tombée : prison ferme pour un ancien président de la République.

 

Et la justice de mettre sous les verrous – certes dorés – celui qui fut chef de l’État.

Bien entendu, la justice est indépendante.

Mais dans ce cas précis, peut-on réellement parler d’impartialité lorsque la présidente du tribunal, Nathalie Gavarino, avait, dix ans plus tôt, manifesté contre la politique du prévenu ?

Un article d’Europe1 rappelait qu’en 2011, alors représentante du syndicat Union Syndicale des Magistrats à Nice, elle avait pris part à une manifestation dénonçant la politique sécuritaire du président Sarkozy.

Des soupçons sans preuve

 

Il lui est reproché d’avoir reçu du régime libyen jusqu’à 50 millions d’euros, alors qu’une campagne présidentielle dite « classique » nécessite environ 20 millions pour être correctement financée.

Cependant, le tribunal a reconnu qu’aucune preuve directe n’établissait que Sarkozy ou ses collaborateurs aient reçu cet argent.

Aucun virement. Aucune valise. Rien.

 

Et pourtant, la condamnation tombe : cinq ans de prison.

Sur la base de quoi ? De présomptions ? De soupçons ?

Un tribunal peut-il enfermer un homme, fût-il ex-président, sur la seule foi de probabilités ?

La justice ne devrait-elle pas relaxer lorsqu’elle ne peut prouver ?

 

Chacun restera libre de croire en la culpabilité de Nicolas Sarkozy.

Surtout celles et ceux qui voient un lien de cause à effet entre sa chute et celle du dictateur Kadhafi, il n’y a pas de fumée sans feu, dit-on. Et, depuis quelque temps, ça fume beaucoup autour de l’ancien président français…

 

Il faut s’interroger, et je m’interroge moi-même, quand bien même j’admire l’orateur, la bête politique qu’il fut, et sa force de persuasion.

Serait-ce justement cette force, cette capacité à convaincre et à séduire, qui pousse certains à douter de sa sincérité ? Ou bien, au contraire, est-ce ce charisme qui nourrit l’acharnement judiciaire dont il ferait l’objet ?

 

Mais, factuellement, il reste difficile d’ignorer que le dossier demeure fragile, et que le principe de présomption d’innocence en sort sérieusement ébranlé.

 


Témoins contradictoires et rumeurs persistantes


En 2016, Ziad Takieddine, homme d’affaires franco-libanais, avait déclaré avoir « remis jusqu’à cinq millions d’euros en espèces depuis Tripoli à Sarkozy et à son chef de cabinet ».

Pourtant, en 2020, il est revenu sur ses propos, parlant d’une erreur et retirant ses accusations.

Un revirement spectaculaire, qui aurait dû fragiliser le dossier.

Pourquoi, dès lors, continuer à s’appuyer sur les déclarations d’un témoin aussi contradictoire et instable ?

 

La presse, la justice et la vérité

 

En 2012, le site Mediapart publiait un document présenté comme émanant des services libyens, affirmant que Kadhafi avait accepté de financer la campagne de Sarkozy à hauteur de 50 millions d’euros.

Sarkozy a crié au faux.

Des expertises ont suivi.

Résultat : le document présentait « les caractéristiques d’un écrit officiel », mais aucune preuve du versement des fonds n’a jamais été apportée.

 

« Ce n’était pas un faux, mais ce n’était pas non plus une preuve. »

Entre ces deux vérités, l’opinion se perd.

 

L’homme derrière le procès

 

Sarkozy reste une figure forte, charismatique, clivante sans doute, mais indéniablement capable.

Il affirme, avec ce ton qui n’appartient qu’à lui, qu’il n’avouera jamais ce dont il n’est pas coupable.

Amoureux des mots et des livres, il emporte avec lui deux volumes symboliques : une biographie de Jésus et Le Comte de Monte-Cristo – deux figures de condamnés injustement accusés, et qui finissent par revenir plus forts.

 

Dans une émission littéraire, il confiait son admiration pour Céline, et notamment pour Voyage au bout de la nuit, que je vous invite à lire ou relire.

Son ouvrage Promenades, que j’ai particulièrement apprécié, partage cette même passion pour la culture, librement, sans arrogance.

Orateur redoutable, esprit vif, il reste l’un des rares politiques français capables de captiver, de provoquer, d’émouvoir même.

 

Et maintenant ?

 

Un homme, fût-il ancien président, ne reste-t-il pas un justiciable comme un autre ?

Faute de preuve, devait-il être condamné ?

La justice, avec si peu d’éléments tangibles – un témoin contradictoire, un document contesté, aucun fonds retrouvé, n’aurait-elle pas dû prononcer un non-lieu ?

A-t-elle voulu aller trop loin pour préserver son image ?

Ou bien la presse, à force d’enquête, a-t-elle fini par influencer la balance ?

 

Et si, un jour, une autre vérité éclatait ?

 




©Vincent Vallée

https://vincentvallee.blogspot.com

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire