lundi 20 juin 2016

Le vieil homme triste.




Le vieil homme triste…

 

Les années ont passé, son visage s’est ridé. Les genoux blessés, les mains gonflées et criblées de taches rousses, son pas est désormais lourd et ralenti…

 

Le col relevé, le chapeau bien vissé, l’homme avance, mains dans le dos, et songe au passé. Le voilà bien seul, i le sait, en réalité la solitude est son lot.

 

Qui autour de lui, pourrait comprendre ses pensées, ses souvenirs marqués par cette période sombre de son existence qui le mine depuis si longtemps ?

 

Continuant son chemin, repensant à ces visages d’antan, une énième larme se fraye un chemin aisé dans une ride déjà si creusée par les années. Non, même l’oubli n’a pas eu raison de cette cicatrice qui, bien que vieille, reste apparente. Elle se creuse, se fraye un chemin sur son visage, un peu comme ses rides.

 

Elles marquent, elles font de son visage le reflet de ce qu'il est... Il lui arrive, comme ressenti — même redouté à l’époque —, qu’elle saigne encore, oui, mais d’autres aussi. Le résumé de sa vie est un échec…

 

L’espoir d’un renouveau, d’une renaissance tant désirée, jamais venue, malgré les efforts consentis, pèsent sur sa conscience. Certes, la sagesse a eu raison de sa désillusion, de son mal-être, mais comment se fait-il que la vie n’ait pas pris le dessus ?

 

Ces spectres, responsables de son tourment et de son mal-être, l’auraient-ils oublié ?

Le voici bien vieux au-dedans de son pauvre cœur. Son âme pleure à nouveau, son corps, lui, le meurtrit encore. Tant et plus... Le regard, troublé par des larmes qui s’amorcent doucement aux relents des souvenirs lancinants, sa peine, ses regrets.

 

Oh ! tant de mal s’est épanché autour de sa personne.

À l’horizon, une ombre se dessine, l’appelle, l’attire...

La mort le guette, et lui l’attend là, debout, mains dans le dos, se murmurant que cet Éden infernal ne mène nulle part, persuadé d’avoir trop vécu pour souffrir encore, il n'avance plus.

 

Son regard patient s’attarde sur elle : celle-ci l’attend. Elle, c’est la mort…

 

L’attente, les cris, les pleurs, sa haine et son désarroi arrivés au comble du supportable. C’est sa sagesse et sa déraison unies qui le font avancer un pas de plus vers le néant qui patiente.

Ces fantômes l’ont trop souvent hanté.

 

Il tombe... Les genoux au sol, résigné à se réveiller chaque matin, la peur au ventre, l’esprit torturé, et puis cette plaie qui lui fait mal, si mal… Encore un effort, quelques pas et le voilà arrivé au terme de son enfer.

Levant les yeux plus haut que de coutume, jetant un ultime regard aux cieux qui sont restés fermés à ses prières, à défaut de monter vers lui, le vieil homme est résigné à descendre là où ses fantômes l’ont conduit : en enfer… Les cieux sont pour les autres manifestement...

 

Au souvenir de sa vie, une dernière fois, sa pensée se trouble. Baissant la tête, yeux clos, il fait un ultime pas en avant qui ne le mènera cette fois nulle part. Un dernier pas, élan de courage qui le fait sombrer, s’engouffrer dans les airs. Les larmes giclent cette fois de ses yeux meurtris.

Ses doigts, si endoloris d’habitude, s’écarquillent dans les airs…

Il ouvrit la bouche et hurla une dernière fois ; sa pensée va à deux visages d’anges. Ensuite, plus rien…

Le vieil homme a sombré, sa sagesse ou sa déraison l’ont jeté du haut de son malheur par cette nuit froide.

Gisant ainsi là où il a toujours été : plus bas que rien…

Allongé dans le sang de sa souffrance, avec lui, son malheur et sa peine ont expiré…

 

Il est en paix ?


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